Par Bandé Moussa SISSOKO
Kayes, 2 avr (AMAP) La nouvelle réglementation permet aux transporteurs de se conformer aux dispositions nationales et internationales en vue de protéger les routes contre une dégradation constante. Les usagers de ces voies sont exposés à des risques d’accidents, parfois mortels
Le gouvernement a décidé de sévir contre la circulation des engins lourds hors gabarit et l’extrême surcharge sur nos routes, dès le début du mois d’avril, à la grande satisfaction des chauffeurs et des activistes. Car, ces phénomènes contribuent à la dégradation des voies et rendent les conditions de circulation et d’exploitation difficiles et couteuses.
De ce fait, à partir du 1er avril 2025, les poids lourds hors normes et hors gabarit ne vont plus emprunter les voies conformément à la communication verbale initiée par le ministre des Transports et des Infrastructures, lors de la session du Conseil des ministres du 12 février 2925.
Dans un communiqué daté du 5 février 2025, le ministre des Transports et des Infrastructures a informé les transporteurs routiers que le gouvernement a engagé les administrations compétentes à assurer le respect des normes relatives aux gabarits, aux poids et à la charge à l’essieu des véhicules lourds de transport de marchandises, conformément aux dispositions du Code de la Route et notamment de l’article 32 du Décret n°2023-0509/PT-RM du 12 Septembre 2023.
L’information a également été portée à la connaissance des autorités des pays concernés par l’application de la mesure qui est conforme au Règlement n°14/CM/UEMOA relatif à l’harmonisation des normes et des procédures de contrôle du gabarit, du poids et de la charge à l’essieu des véhicules lourds de transport de marchandises.
Il ressort de ce document que l’application de cette réglementation vise à lutter contre la circulation des véhicules hors normes et hors gabarit en surcharge sur les routes. Cela s’explique par le fait que la circulation de ces engins entraîne la dégradation précoce du réseau routier national.
De ce fait, les autorités exhortent les propriétaires des véhicules en cause à se conformer aux dispositions du décret susmentionné au plus tard avant le Jour-J. « Passé ce délai, les services techniques chargés du contrôle de l’application de la réglementation procéderont à l’immobilisation des véhicules gros porteurs hors normes et hors gabarit, qui circulent sur les corridors routiers du Mali, en contravention aux dispositions légales en vigueur », indique le ministre des Transports et des Infrastructures dans son communiqué.
ORIENTER VERS LES CENTRES DE TRANSFORMATION – Pour trouver des solutions à la dégradation prématurée des infrastructures routières, le ministre des Transports et des Infrastructures, en collaboration avec son homologue de l’Economie et des Finances, a organisé le 8 janvier 2025 une réunion de concertation entre les services techniques des départements ministériels, les transporteurs, les chargeurs, les transitaires et les commerçants. Cette réunion a recommandé la réalisation d’une campagne de sensibilisation de l’ensemble des acteurs pendant trois mois. L’objectif est de permettre à ces acteurs de se conformer aux dispositions du Code la route, et notamment celles du Décret n°2023-0509/PT-RM du 12 Septembre 2023 fixant les conditions de l’usage des voies ouvertes à la circulation publique et de la mise en circulation des véhicules.
Le directeur régional des Transports à Kayes, Ahmadou Haïdara, a expliqué que deux étapes ont été envisagées pour l’application des mesures édictées. Dans un premier temps, sa direction, de concert avec les services compétents, mène, depuis le 31 décembre dernier, une campagne de sensibilisation de trois mois en direction des transporteurs, des usagers de la route et d’autres acteurs évoluant dans le secteur du transport.
Ensuite, la direction régionale a tenu des séances de formation de 16 volontaires sur le Règlement 14 de l’Union monétaire ouest-africaine (UEMOA). Ces volontaires sont répartis entre les postes frontaliers de Diboli (Cercle d’Ambidédi) et de Mahinamine (Cercle de Kéniéba).
Il faut rappeler que l’axe Bamako-Diéma-Dakar passe par Diboli. Tandis que l’autre route internationale Bamako-Kita-Kéniéba-Dakar, connue sous l’appellation de « Route de l’or », transite par Mahinamine. Selon les estimations, au moins 500 camions transitent chaque jour par ces deux postes frontaliers du Sénégal.
« L’Etat a fait d’énormes investissements pour désenclaver le pays. Quand l’opération va démarrer, les engins immobilisés seront orientés vers les centres de transformation pour les ramener à la norme. Si le camion est chargé, on le décharge et ses pièces seront retenues par la Douane. Les camions vides seront placés sous le contrôle de la police », a expliqué Ahmadou Haïdara.
Apparemment, les acteurs du secteur du transport sont mobilisés pour la réussite de l’opération qui, selon certains, doit s’étendre à l’intérieur de nos villes. Le problème des engins lourds hors gabarit et hors norme a été posé lors d’une rencontre avec une mission nationale de sensibilisation tenue à Kayes entre 2017 et 2019.
Le président du Conseil malien des transporteurs routiers (CMTR) a demandé à ses différentes structures de base de donner les bonnes informations aux acteurs concernés afin que ceux-ci se mettent en règle avant la date butoir.
Du côté du Syndicat national des transporteurs routiers urbains et interurbains (SYNTRUI), le président du bureau régional de Kayes, Baïdy Maïga trouve que la mesure est bonne car, elle donnera une longue vie à nos routes qui, selon lui, sont dépassées.
D’après lui, son application permettra d’augmenter le trafic. « Une seule remorque peut transporter les marchandises de 4 véhicules. Avec la nouvelle réglementation, ces 4 véhicules ne resteront plus au garage à la grande satisfaction de leurs chauffeurs qui ne perdront plus leurs emplois », a-il-commenté.
Dans le camp des chauffeurs, la nouvelle règlementation suscite une lueur d’espoir. Ce samedi 22 mars 2025, les populations de Soutoucoulé-Bagadadji, une banlieue de la Commune urbaine de Kayes, vaguent à leurs occupations quotidiennes sous un soleil de plomb. Il y a moins d’embouteillage sur la voie même si des piétons sont souvent obligés d’attendre trois minutes ou plus pour pouvoir traverser, à cause du passage de motocyclistes qui roulent souvent à vive allure, de gros porteurs et d’autres véhicules.
De l’autre côté de la route goudronnée, on aperçoit des apprentis, en train de décharger un gros porteur de ses marchandises. Ces apprentis et leur chauffeur sont-ils avertis du communiqué du ministre des Transports et des Infrastructures ?
Même son de cloche pour Mamadou Coulibaly, président du Conseil régional des organisations de la Société civile de Kayes. « On a porté ce plaidoyer, il y a longtemps. Nous avons appris cette mesure avec soulagement. Les engins lourds hors gabarit et hors normes détruisent nos routes sous le regard impuissant des agents des postes de pesage et de péage », souligne-t-il.
Chez les chauffeurs, la nouvelle règlementation est bien accueillie car, elle traduit l’engagement des autorités de la Transition de sauver nos routes. « C’est bien pour le chauffeur et le véhicule. C’est notre objectif. A cause du mauvais état des voies, beaucoup de véhicules tombent en panne à cause de leur châssis ou de leur tuyau. D’autres se renversent à cause de la surcharge, du mauvais état de leurs pneus et des nids de poule, provoquant des pertes en vies humaines et des dégâts matériels », commente Bocar Faye, un chauffeur assis au milieu de gros porteurs garés, près d’une station-service de Soutoucoulé, un village de la Commune rurale de Khouloum, dans la périphérie de Kayes.
De l’autre côté de l’axe Bamako-Kolokani-Diéma-Kayes-Dakar, notre équipe de reportage a aperçu des apprentis en train de décharger un gros porteur sous un soleil ardent. Ce samedi 22 mars 2021 à 10 heures, leur chauffeur, un Sénégalais, est assis devant un magasin de stockage. Pour cet interlocuteur, l’Etat malien devrait faire comme le Sénégal, qui a fixé le poids limite à 72 tonnes. Et de s’étonner qu’au Mali, certains véhicules transportent jusqu’à 60 à 80 tonnes, alors que la moyenne est de 35 à 50 tonnes.
BMS/MD (AMAP)


