Par Anne Marie KEÏTA

L’activité fait vivre de nombreuses femmes aussi bien en milieu rural qu’en milieu urbain

Bamako, 16 mar (AMAP) A côté des producteurs d’arachide qui bénéficient de plusieurs avantages liés à sa culture, les femmes qui la transforment en pâte d’arachide tirent, aussi, leur épingle du jeu.

La transformation artisanale de l’arachide, une activité informelle majoritairement pratiquée par les femmes, est une manière pour elles d’avoir un revenu et subvenir aux dépenses familiales, tout en obtenant une autonomie financière.

L’arachide transformée en pâte, communément appelée «Tiga-dèguè », outre son caractère incontournable dans la gastronomie malienne, génère des revenus importants allégeant ainsi le poste alimentation du budget des ménages.

L’arachide constitue une filière essentielle à l’économie malienne. Elle demeure une légumineuse très appréciée et riche en nutriments. La filière a beaucoup évolué au cours de ces dernières années à travers sa transformation artisanale informelle qui conserve d’ailleurs, une place significative dans la valorisation de cette légumineuse.

Dans la lutte contre l’insécurité alimentaire et la pauvreté, les femmes sont au premier rang. Elles s’investissent dans les activités génératrices de revenus notamment dans la transformation agro-alimentaire

La capacité de ces femmes instruites ou peu instruites à opérer des innovations complexes et à s’inscrire dans une logique de mobilisation de fonds pour propulser les affaires, est un facteur de réussite des actions entreprises. Beaucoup d’entre elles développent leurs activités économiques génératrices de revenus sur fonds propres en renforçant ainsi leur rôle dans la société et dans la famille. Et d’autres, par manque de moyens, s’associent en groupement ou en association pour faire la transformation. Aussi, le caractère pénible des travaux de la transformation de la pâte d’arachide oblige certaines à s’associer.

Dans la ville de Kati, sur les hauteurs de Bamako, la capitale malienne, les femmes occupent une place de choix dans la transformation de l’arachide. Elles sont au début du processus jusqu’à la commercialisation du produit fini. On rencontre ces femmes un peu partout au grand marché de Kati, où elles achètent l’arachide et la transforment sur place en pâte pour ensuite la revendre.

Mme Diarra Aminata Koné fait partie de ces battantes dont le quotidien est consacré à la transformation de l’arachide. La quinquagénaire, mère de quatre filles, mène cette activité depuis 10 ans. Elle en tire de quoi payer la scolarité de deux de ses filles. Les deux autres, qui ne fréquentent pas l’école faute de moyen, épaulent leur maman. Sa fille, déjà douée dans la transformation, témoigne : «C’est grâce à cette activité que notre mère ne tend plus la main.»

Non loin de Mme Diarra Aminata Koné, se trouvent également les dames Sadio Coulibaly et Fanta Traoré. Très occupées, à notre passage, elles n’étaient pas disponibles pour nous parler : «On a une commande de 10 seaux de pate d’arachide à livrer avant 16 heures», nous fait savoir l’une d’elles.

Il n’y a pas que les femmes non lettrées qui exercent ce métier. Maïmouna Coulibaly, titulaire d’une maitrise en droit depuis 2010, est de celles-là qui préfèrent le labeur à la facilité. Elle a perdu son mari alors qu’elle était au chômage et mère de deux enfants.

Maïmouna décide alors de prendre son destin en main en se lançant dans la transformation de l’arachide. Elle a démarré avec un petit fonds de 50.000 Fcfa. Aujourd’hui, elle réalise un bénéfice mensuel de 75.000 Fcfa.

manque de matÉriel – Au quartier mission de Kati, des femmes se sont organisées en groupement pour faire prospérer leur activité. Un mardi matin, à 7 heures, dans la cour de la présidente du Groupement de femmes transformatrices de pâte, Mme Ballo Fatoumata Diarra commence les activités en attendant l’arrivée des autres membres.

Tout sourire, elle nous explique que la transformation de l’arachide est une activité pénible mais rentable. Aujourd’hui, Mme Ballo en tire des revenus importants qui lui assurent une indépendance financière.

Dans ce même ordre d’idée, la présidente du groupement, Mme Kanté Emilienne Ballo, explique avoir initié cette activité pour permettre aux femmes de son entourage de se prendre en charge financièrement. «J’ai remarqué que beaucoup d’entre nous reste à la maison à ne rien faire. J’ai pensé qu’il faut une activité pour nous occuper quotidiennement et nous procurer des bénéfices pour nous permettre d’assurer notre indépendance financière », explique Mme Kanté, ajoutant que son groupe a une vocation d’entraide et de solidarité.

Concernant les difficultés, la présidente confie que son groupement souffre du manque de matériel de travail. Elle a, aussi, fait savoir que le prix de l’arachide a augmenté ces derniers temps : le sac de 100 kg est passé de 65 000 Fcfa à 75 000 Fcfa. D’où la cherté de la pâte d’arachide sur le marché. Actuellement, le seau de 10 kg est vendu à 15.000 Fcfa et celui de 5 kg coûte 7 500 Fcfa.

«Notre souhait le plus ardent est d’avoir des appuis financiers pour acheter la matière première et le matériel afin de pouvoir faire des stocks pour s’assurer de la continuité du travail», plaide la présidente.

Par jour, ces femmes peuvent parfois transformer plus de 100 kg d’arachides et écouler une dizaine de seaux de pâte d’arachide transformée. Ce qui atteste de la bonne organisation et du sérieux au sein du groupement de femmes dans le travail. «Pour que la pâte soit de bonne qualité et appréciée par les clients, il faut veiller à l’hygiène et à la qualité de l’arachide pour la transformation», précise Mme Kanté Emilienne Ballo. Ce conseil est suivi par les autres membres. « À preuve, poursuit la présidente du groupement, les clients sont satisfaits de leurs produits. »

En suivant la chaîne de valeur de transformation de l’arachide en pâte, l ;es transformatrices font, d’abord, de façon minutieuse, le tri de l’arachide à la main pour enlever l’ivraie, les cailloux, les coques et d’autres déchets.

Après cette étape, elles font passer à la grillade à l’aide d’un tambour manuel posée sur le feu. Lorsque les graines d’arachide sont soigneusement grillées, sa pellicule rouge commence à se libérer. Les graines blanches sont ensuite passées à la machine pour être transformées en pâte.

AMK/MD (AMAP)