Covid-19 : Difficile respect des mesures de prévention

Par Bembablin DOUMBIA

Bamako, 24 mars (AMAP) Dans les transports en commun, dans les marchés, lieux de mariages, baptêmes et funérailles, nos concitoyens ignorent superbement les gestes barrières et autres mesures de prévention prises par les autorités.

«Le Coronavirus ? C’est un projet des blancs», réplique un apprenti à un syndicaliste qui lui disait de ne pas le toucher. Comme cet apprenti, ici au «Rail-da», en plein centre-ville du district de Bamako, ils sont nombreux dans le monde des transports en commun à ne pas encore prendre la mesure du danger que représente le Covid-19. Tous, ou presque, font fi des mesures préventives prises par les autorités. Notre équipe de reportage embarque dans un minibus de transport en commun, Sotrama, à l’arrêt dit «Place kôrô» pour le «Rail-Da».

En cet après-midi de vendredi, difficile pour un automobiliste de se frayer un chemin. Entre ces deux arrêts, nous avons banalement fait vingt minutes. Une vingtaine de minutes de calvaire pour les passagers entassés les uns sur les autres dans le véhicule. Certains transpirent à grosses gouttes. L’apprenti, qui se préoccupe visiblement peu des consignes édictées par les autorités, continue d’appeler d’autres clients. «Mais le Sotrama est plein non ? », demande-t-on. «Oui, mais certains vont tout de suite descendre», répond le jeune garçon.

Tout au long du trajet, les passagers ont débattu de toutes sortes de sujets sauf du coronavirus. Chose curieuse ! Arrivée à destination, c’est la bousculade. Tout le monde est pressé de descendre. Les uns se frottent aux autres, tout en ignorant superbement les mesures barrières. Il faut reconnaitre qu’aucune mesure n’a été prise par les acteurs des transports en commun pour éviter la propagation du coronavirus s’il venait à entrer dans notre pays. Mamadou Koné, chauffeur d’un Sotrama le confirme. «Je n’ai rien pris comme mesures pour éviter la contagion des passagers», dit-il.

PAIN QUOTIDIEN – Mamoutou Bagayoko, un autre chauffeur de Sotrama, attend son tour pour embarquer des passagers, à l’arrêt dit «Centre Dioliba», non loin de «Mali-Mag», au centre commercial. Le jeune conducteur se soucie plus de son pain quotidien que du coronavirus. «Ce virus a apporté d’autres difficultés», lâche-t-il, une cigarette en main. «Nous, les chauffeurs, vivons au jour le jour. Et dans ces conditions, c’est difficile pour nous de respecter des mesures des autorités contre le coronavirus», argumente notre interlocuteur tout en secouant la tête, avant d’enchaîner sa deuxième mèche de cigarette. Le chauffeur de Sotrama reconnait tout de même que les décisions des autorités sont utiles pour préserver la santé de la population.

Seydou Keïta, membre du syndicat de transport urbain de la rive gauche, indique que son organisation n’a pas encore évoqué le sujet. En effet, ils attendent que les autorités leur donnent par exemple des masques, savons liquides et gel hydro alcoolique pour qu’ils puissent les mettre à la disposition des chauffeurs, apprentis et clients passagers. Tel n’est pas le cas encore.

Autre secteur, autre réalité. Au grand marché de Bamako, certains commerçants ont pris des précautions, minimes soient-elles. Il s’agit de l’installation de kits de lavage de mains au savon et du gel hydro alcoolique. « Rien ne vaut la santé», nous dit Badian Sidibé, un vendeur de prêt-à-porter pour enfants. Ce boutiquier qui utilise, permanemment, ce produit hygiénique, pense que cette situation va beaucoup jouer sur leurs activités «déjà au ralenti». Badian Sidibé envisage quand même de prendre des mesures pour éviter que les clients s’entassent dans son magasin.

PATROUILLE – A quelques pas de là, se trouve la boutique de Ladji Sacko. Il est vendeur des bicyclettes. Dans son magasin, il y a le gel hydro alcoolique que tout visiteur peut utiliser. A notre passage, Ladji discutait avec l’un de ses collaborateurs pour avoir le cache-nez de bonne qualité. Notre interlocuteur apprécie la suspension des vols commerciaux pour éviter que le coronavirus entre dans notre pays. Mieux, il invite les décideurs à prendre aussi des mesures pour prémunir le grand marché où circule un flot de personnes de diverses nationalités.

Si l’interdiction du regroupement de plus de 50 personnes est difficile à faire respecter dans nos marchés, il en est de même pour les gestes barrières lors des cérémonies de mariage, baptême et funérailles. Le dimanche dernier, les mariages ont été fêtés à Bamako, en toute méconnaissance des mesures de prévention contre le Codiv-19. Certains bars et boites de nuit continuent aussi d’accueillir les clients, malgré l’interdiction.

Face à l’incivisme, le ministre de la Sécurité et de la Protection civile a fait un communiqué dans lequel il dit avoir constaté avec regret le non-respect des mesures de prévention issues du Conseil supérieur de la défense nationale dans le cadre de la lutte contre le Coronavirus, une pandémie mondiale. «Malgré les mises en garde des autorités, au travers de multiples communications, certains citoyens persistent à  organiser des rassemblements à l’occasion de mariages, de baptêmes et autres cérémonies fastueuses. Face à ces comportements que rien justifie, le Ministre informe l’opinion que des mesures drastiques sont d’ores et déjà prises pour contraindre les contrevenants à se conformer aux prescriptions en vigueur», précise le communiqué, ajoutant que toute personne prise en  violation flagrante des mesures imposées, répondra de ses actes devant la justice.

Le directeur régional de la Police nationale à Bamako a constitué deux équipes de patrouille pour appliquer les mesures prises par le gouvernement concernant la fermeture des boîtes de nuit, des bars, des dancings et tous autres lieux de rassemblement de plus de 50 personnes. Ces deux équipes, composées de la Police nationale et de la Gendarmerie nationale, sillonnent, depuis dimanche soir,  Bamako et environs. Conformément aux instructions du ministre en charge de la Sécurité, elles doivent mettre en avant la sensibilisation avant de passer à la sanction.

BD/MD (AMAP)