Aviculture à domicile : Une filière en pleine expansion

Par Makan SISSOKO

Bamako, 26 Nov (AMAP) L’aviculture, une activité qui requiert une attention accrue de la part du promoteur, semble avoir, aujourd’hui, le vent poupe au Mali. Le secteur est en pleine expansion depuis quelques années. Devenu un refuge pour de nombreux diplômés sans emplois, elle offre de réelles opportunités d’affaires. Beaucoup de ceux qui s’y adonnent,, notamment à Bamako, s’activent dans l’aviculture domestique. Certains aménagent, à cet effet, un coin de la maison familiale. D’autres, exploitent, faute d’espace, les toits des habitats, où ils fabriquent des enclos recouverts entièrement de tôles.

C’est le cas de Chiaka Dembélé. Diplômé de la Faculté des sciences juridiques et politiques de Bamako, il vit avec sa femme et ses enfants chez ses parents à Kalaban-coura, en commune V du district de Bamako. L’élevage de poussins est, depuis deux ans, au cœur des activités de ce jeune diplômé sans emploi pour pouvoir joindre les deux bouts. Sur son toit, Chiaka Dembélé a aménagé un espace. Il y élève des poussins qu’il revend au bout de 40 jours.

Cette activité est, certes, laborieuse mais elle nourrit son homme. Il doit veiller sur la qualité de l’alimentation et de l’habitat des sujets en terme de confort et d’assainissement. Toute négligence peut lui coûter cher. «C’est un travail qui demande de la constance et du courage en permanence pour espérer obtenir de bons résultats», dit le volailleur.

« Les poulets de chair, dit-il, subissent un long processus de formation qui dure près de deux mois. Au cours de laquelle, ils ont besoin de meilleures conditions d’hygiène, d’alimentation et d’un suivi médical approprié en termes de vaccination ». «Depuis que j’ai commencé cette activité, je n’ai pas d’autre vie ni d’autres occupations. Je consacre tout mon temps et toute mon énergie à leur entretien. C’est un travail pénible qui demande un suivi régulier. Les poulets de chair mangent et boivent toute la journée : matin et soir. Un instant d’oubli peut-être souvent fatal», relate-t-il.

Ils sont importés de pays voisins, notamment du Sénégal et d’Europe, tels que l’Angleterre et l’Espagne. Pour s’adapter aux conditions climatiques du Mali, il leur faut de l’éclairage en permanence et du chauffage pour pouvoir survivre, ajoute l’aviculteur.

 

REVENU APPRECIABLE – Une somme d’expériences qu’il a acquise après avoir trébuché. «Au début, je prenais 100 à 140 poussins. Sur ce nombre, seulement 60 à 70 arrivaient à terme. Je commence à m’adapter. Actuellement, je suis à 400 poussins qui sont presque arrivés à maturité. Pour leur alimentation, j’achète cinq à six sacs de concentré, en raison de 35.000 Fcfa par unité. Pour le moment, je n’ai pas enregistré de perte», s’est réjoui le jeune diplômé.

Evoquant son chiffre d’affaires, Chiaka Dembélé indique qu’il peut avoir, après les dépenses, un revenu variant entre 150.000 à 175.000 Fcfa après chaque vente, en raison de 2.000 Fcfa par poulet. «Je vends la majorité de mes poulets aux hôteliers. L’élevage de poussins coûte énormément cher, mais je parviens à couvrir mes dépenses familiales et à subvenir à mes besoins en attendant de trouver mieux, c’est-à-dire un emploi salarié correspondant à mon profil », a-t-il dit.

Tout comme lui, Soumaïla Traoré est aviculteur. Ce jeune homme âgé de 32 ans, en chômage technique depuis près d’un an, s’y est lancé pour subvenir à ses besoins. «L’aviculture locale est mon loisir préféré depuis l’adolescence. Je l’exerce actuellement pour gagner un peu d’argent, en entendant la reprise de mon travail», répond Soumaïla. Dans sa cour à Garantiguibougou, il a construit un vaste enclos en étage où il garde des pigeons et des poulets.

Debout au milieu de la basse-cour, dans sa main une calebasse remplie de céréales dont il jetait le contenu par terre pour inviter la volaille à sortir. En un laps de temps, il se retrouve entouré de volaille. «J’ai acheté 200 poussins de chair dans l’espoir de les revendre à l’occasion de la fête de fin d’année pour pouvoir faire un peu de profit. J’ai déjà eu des commandes pour la fête du 31 décembre. Cette fois-ci, si les affaires marchent pour moi, j’espère rester dans le secteur avicole», lance Traoré. Qui dit se faire aider par son jeune frère de 15 ans pour l’entretien de ses oiseaux. « Car, soutient-il, l’aviculture locale est une activité prenante, donc difficile à concilier avec d’autres métiers ». «Les poulets de chair sont fragiles à la différence des locaux. Leur avantage est qu’ils ont une croissance rapide qui permet de les écouler assez vite», précise notre interlocuteur.

À l’approche de la Saint-Sylvestre, communément appeler « fête des poulets », Abdoulaye Guindo, un jeune étudiant, s’active. A Kalaban coura ACI où il habite, il a été initié à l’aviculture par son frère ainé. Ce dernier élevait des poussins en famille et réalisait énormément de profit. En se lançant, Abdoulaye Guindo s’est servi des équipements, notamment le poulailler de son aîné. «Je viens de démarrer les activés avec seulement 100 poussins, à raison de 600 Fcfa l’unité, plus un sac d’aliment qui coûte 35.000 Fcfa. En fin de compte, si tout marche bien, je pourrais avoir un bénéfice allant de 75.000 à 80.000 Fcfa», pronostique Guindo. Qui compare l’aviculture à un jeu de loterie : entre chance et malchance, on peut ne pas obtenir le résultat escompté. « Cela, compte tenu de la fragilité des poussins de chair », soutient-il.

 

CONSEILS ET ASTUCES – « Des difficultés surmontables », estime Fousseiny Bougoudogo, agent commercial au sein d’un groupe spécialisé dans la distribution de poussins et la vente de produits et matériels avicoles. Cette société travaille avec plusieurs couvoirs à l’intérieur comme l’extérieur du Mali, notamment les incubateurs locaux et ceux du Sénégal spécialisés dans la production, l’amélioration et la vente de produits avicoles au Sénégal et dans la sous-région.

Ce spécialiste prodigue des conseils et quelques astuces pour réussir dans cette activité. Selon lui, les aviculteurs doivent tenir compte des difficultés liées à l’importation des poussins : le trajet Dakar Bamako est pénible pour les poussins, surtout en période de forte chaleur. En la matière, les poussins importés sont généralement, transportés par avion ou par voiture. Il indique que le temps de réserve des poussins, avant l’installation dans les fermes, est de 72 heures au préalable sans boire, ni manger.

«La bonne qualité de poussin généralement importé est le poussin chair Cobb 500 qui est la plus prisée par les clients », conseille-t-il. « Dans l’importation des poussins, il est nécessaire de diminuer le temps de transport pour éviter le stress. Ce qui permet de réduire le taux de mortalité des poussins qui est élevé à cause des problèmes respiratoires», ajoute l’agent commercial.

Il importe aussi d’entretenir, régulièrement et correctement,t les fermes pour obtenir des résultats satisfaisants. «Avant l’installation des poussins, il est sage de désinfecter les fermes, trois jours en avance. Très souvent, on met en faute les vendeurs et les producteurs d’aliments volaille alors que le problème se situe au niveau de la gestion des fermes», commente le spécialiste.

Il invite les aviculteurs à prendre conseils auprès des fournisseurs avant de se lancer dans le secteur, afin de pouvoir rentabiliser leurs investissements.

MS/MD (AMAP)