Mali/Agriculture : Des nuisibles dans les champs inquiètent les  producteurs

Par Makan SISSOKO

Bamako, 20 oct (AMAP) La campagne agricole est prometteuse dans plusieurs zones de productions agricoles du Mali. Le maïs, le riz sont arrivés à maturité. Le mil et le sorgho sont en épiaison, le coton est en fructification.

Cependant, des paysans craignent les conséquences des invasions de nuisibles, ennemis des cultures. Issa Koné est cultivateur de coton dans le secteur de Garalo, Région de Bougouni (Sud). En plus du coton, il cultive du gombo, de l’arachide et du maïs. Depuis juin dernier, des nuisibles envahissent ses champs. «L’évolution des cultures était bonne et normale. L’apparition précoce des nuisibles a changé la tendance», regrette le paysan, contacté au téléphone.

Deux des sept hectares qu’il possède ont été infestés par les ravageurs. Ils mangent les feuilles des plantes jusqu’à la sève, entraînant l’arrêt de leur croissance. «Tous les trois jours, je traite mon champ, mais les nuisibles résistent aux produits. J’ai investi plus de 250 000 Fcfa dans l’achat de pesticides. Depuis la campagne agricole de 2007, les attaques de nuisibles n’ont pas été aussi précoces et féroces», se rappelle M. Koné.

Son collègue Yaya Ballo est cotonculture dans la zone de Konséguela, Région de Koutiala (Sud). Il déplore l’inefficacité des solutions apportées jusqu’ici. «Nous avons appelé les agents de la Compagnie malienne de développement des textiles (CMDT) qui, après des passages, peinent à nous trouver des solutions. Ils soutiennent que ces infestations sont causées par des nuisibles », dit Ballo.

« Nous connaissons ces insectes qui apparaissent chaque année. Nous pensons que cette maladie est simplement liée à la pluviométrie», soutient le paysan dont les 34 hectares de coton sont affectés. Il implore les techniciens agricoles de trouver des solutions à ce fléau et sollicite le soutien des autorités du Mali.

L’Office de protection des végétaux (OPV) est spécialisé en la matière. « Des nuisibles ont fait récemment irruption dans certaines zones de production de coton et d’autres cultures vivrières notamment, le gombo, le da, le riz, le maïs, etc. dans plusieurs bassins de productions », confirme le chef de division surveillance alerte et intervention à l’OPV, Adama Mallé. « Les céréales ne sont pas touchées pour le moment », rassure le technicien. Les spécialistes en protection des végétaux de l’OPV aident les producteurs à lutter contre ces ravageurs qui impactent fortement le rendement.

 

SPECIFICITÉ – Au Mali, il existe plusieurs types de ravageurs des cultures : les criquets sont fréquents dans la bande sahélienne, les chenilles sur les cultures dont les tomates les concombres et les melons. Sans oublier les mouches de fruits, les coléoptères, les acariens blanches, termites et les maladies végétales.

Il existe des nuisibles et maladies spécifiques à chaque zone de culture. À l’Office du Niger (ON) par exemple, « il y a eu des problèmes de rongeurs sur les cultures. Les rats, les souris et les oiseaux granivores font des dégâts sur le mil, le riz, le sorgho et les cultures maraîchères », explique le spécialiste.

« La situation des nuisibles, poursuit le chef de division surveillance alerte et intervention à l’OPV, est moins préoccupante cette année malgré quelques menaces ». «De façon générale, nous disons que la situation des nuisibles est relativement calme. Nous n’avons pas enregistré de cas d’infestations majeurs», rassure-t-il.

Adama Mallé précise qu’il a été constaté, au niveau des champs de coton, l’arrivée précoce d’un ravageur sur le cotonnier : Jassides, piqueurs suceurs. Ce ravageur a affecté beaucoup de zones de production de coton et d’autres cultures maraîchères. Selon lui, ce ravageur qui existe sur place n’est pas nouveau. « Sa forte pullulation a surpris beaucoup de producteurs et même l’encadrement », ajoute-t-il, soulignant que des cas d’infestations ont été signalés sur des cotonniers à Kadiolo et dans plusieurs localités du Mali.

 

JASSIDES – Concernant ce ravageur, le technicien révèle qu’il s’agit des Jassides appelés Jacobiella facialis. «Avec les responsables de la Compagnie malienne pour le développement des textiles (CMDT), nous avons mené une mission d’inspection dans les filiales de Kadiolo, Bougouni et de Sikasso. Dans ces zones-là, nous avons vu le ravageur sur le cotonnier et il a fait aussi des dégâts. Nous sommes en train d’analyser les facteurs qui ont entrainé cela», explique M. Mallé.

En attendant, le chef de division surveillance alerte et intervention à l’OPV encourage les producteurs de continuer à intensifier le traitement des champs pour pouvoir venir à bout du destructeur. La nature du ravageur étant connu, il demande aux paysans de ne pas céder à la paniquer.

« À l’instar des piqueurs suceurs (pucerons, jassides, acariens, etc.), d’autres ravageurs notamment, la chenille légionnaire d’automne se signalent », indique Adama Mallé. Introduite en Afrique en 2016, à partir du Nigeria, cette chenille originaire des États Unis d’Amérique apparaît au Mali en 2017, en s’attaquant au maïs de contre saison.

Comparé aux années précédentes, certes, elle a été moins vorace sur le maïs cette année. «Mais, elle existe toujours. Nous sommes en train de la gérer de façon efficace et efficiente», explique Adama Mallé.

Selon lui, la situation est relativement calme dans l’ensemble. Le technicien ajoute que la campagne agricole est même prometteuse dans plusieurs zones de productions agricoles du pays, grâce à la bonne pluviométrie enregistrée.

Pour prévenir l’expansion des ravageurs, le chef de division surveillance alerte et intervention à l’OPV invite les producteurs à mettre l’accent sur le traitement des champs. Il leur demande de signaler rapidement à son service toute présence de nuisibles. «Nous disposons d’un stock important de bio pesticides, depuis 2019. Les producteurs ne viennent pas souvent s’en approprier. Ces produits sont subventionnés par l’État et donnés gratuitement aux paysans pour le traitement de leur champ en cas d’infestations», explique Adama Mallé.

En attendant, le paysan Issa Koné, lui, redoute une chute de son rendement. Et se demande comment il va faire pour rembourser les prêts qu’il a contractés chez les fournisseurs publics et privés.

MS/MD (AMP)