Transformation des fientes de poules en biogaz : Une solution énergétique et écologique

Le projet nécessite de surmonter les obstacles financiers et techniques

Par Amadou GUÉGUÉRÉ

Bamako, 18 déc (AMAP) L’innovation naît souvent d’un regard nouveau porté sur des ressources sous-estimées. Face aux défis environnementaux croissants et à la nécessité de promouvoir des énergies renouvelables, certaines initiatives locales se distinguent par leur originalité et leur impact.

Le projet de transformation des fientes de poules en biogaz, encore en phase de développement, illustre bien que les ressources, souvent négligées, peuvent être aussi transformées en solutions énergétiques durables.  Ce projet, qui allie écologie et énergie, a été développé par une équipe du Laboratoire de recherche en biomasse et bioénergie (LaReb) de la Faculté des sciences et techniques (FST).

Composée de cinq membres, l’équipe ambitionne de répondre à des enjeux cruciaux liés à l’environnement, à la santé publique et à la gestion durable des déchets avicoles.

Le biogaz, rappelons-le, est un mélange de gaz composé de 50 à 70 % de méthane. Ousmane Diakité, l’un des responsables du projet, explique que le processus repose sur la méthanisation. « La méthode consiste à décomposer les matières organiques à l’aide de micro-organismes dans des enceintes spécialisées, appelées digesteurs ou biodigesteurs, permettant ainsi de produire une énergie renouvelable tout en réduisant les déchets », dit-il. « Cette innovation contribue à réduire les gaz à effet de serre et à mieux gérer les déchets organiques », poursuit M. Diakité.

Les avantages écologiques du projet sont nombreux. « En réduisant les déchets avicoles et les émissions de gaz à effet de serre, nous contribuons à la lutte contre le changement climatique. De plus, notre approche est adaptable à d’autres types de déchets, tels que les déchets agricoles, urbains ou industriels grâce à la co-digestion», détaille-t-il.

À court terme, l’équipe ambitionne de développer un prototype fonctionnel et, à long terme, de passer à l’échelle industrielle. Le chemin est cependant semé d’embûches. « La technologie de biodigestion est très coûteuse et les défis physico-chimiques, notamment le rapport carbone-azote qui rentre dans les paramètres de production de biogaz, constituent des obstacles », explique le chercheur.

De plus, pour assurer une production continue, une grande quantité de matière première est nécessaire. « Nous avons opté pour des technologies en continu. Cela signifie qu’il faut alimenter quotidiennement le digesteur avec de la matières première », ajoute le Laborantin.

Et de préciser que la taille du digesteur dépend des besoins énergétiques de chaque famille : « Pour une famille de moins de six personnes, un digesteur de 1 000 litres avec un volume de travail de 800 litres peut suffire. Il faudrait alors alimenter le digesteur quotidiennement. Par exemple, pour un digesteur de 100 litres avec un volume de travail de 80 litres, il faudrait l’alimenter chaque jour avec environ 4 litres de matières premières pour garantir une production continue ».

solution À la crise ÉnErgÉtique – En outre, le chercheur souligne que cette technologie pourrait constituer une solution durable face à la crise énergétique que traverse le pays. Il appelle les autorités à encourager de tels projets en facilitant l’accès aux financements et en soutenant les initiatives locales. «Il est essentiel de vulgariser ce type de production d’énergie renouvelable, qui est non seulement bénéfique pour l’environnement, mais également pour les économies locales», dit-il.

Les cibles prioritaires de cette innovation sont les aviculteurs, les agriculteurs et les populations rurales. « La bioénergie est l’énergie la plus proche des communautés. Elle offre une solution pratique et accessible pour résoudre les problèmes énergétiques auxquels elles font face», explique notre interlocuteur. Avant d’appeler également la population à adhérer à cette initiative, qu’il décrit comme une réponse au bon sens face aux enjeux actuels.

Cependant, le projet manque pour l’instant de partenaires solides, même si un début de collaboration existe entre l’Agence nationale de développement des biocarburants (ANADEB) et la FST.

Ousmane Diakité conclut en insistant sur l’urgence climatique et la nécessité de solutions innovantes : « Nous sommes tous concernés par la menace climatique qui pèse sur notre planète. L’énergie verte, comme le biogaz, est une solution d’avenir qui mérite d’être soutenue. »

Si la technologie parvient à surmonter les obstacles financiers et techniques, elle pourrait offrir une alternative écologique précieuse tout en contribuant à la gestion des déchets agricoles.

Le projet a remporté le premier prix du concours «Innovation challenge sur les énergies renouvelables», organisé par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), en partenariat avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique.

AG/MD (AMAP)