Bamako, 05 mai (AMAP) La Cour d’Appel de Bamako a entendu, lors de l’audience du mercredi, l´ancien Premier ministre Moussa Mara , dans le procès de l’affaire « achat de l’avion présidentiel et équipements militaires. »
M. Mara s’est expliqué, après l’intervention de Mme Bouaré Fily Sissoko, dont la défense a demandé la comparution de l’ancien ministre délégué chargé du Budget au moment des faits, Madani Touré et de l’ancien Premier ministre Oumar Tatam Lla Cour a appelé l’ancien Premier ministre, Moussa Mara pour son témoignage sur les deux dossiers.
Dans ses déclarations à la Cour, l’ex-Chef du gouvernement, a dit avoir pris connaissance du dossier suite à une discussion avec l’ancienne ministre Mme Bouaré Fily Sissoko après des réserves du Fonds monétaire international (FMI) sur la question.
« Pour éclairer la lanterne du FMI et arriver à faire en sorte que ces deux dossiers n’aient pas d’impact sur les relations entre notre pays et cette organisation, il avait été convenu de faire intervenir une structure de contrôle sur ces deux opérations », a-t-il souligné.
Moussa Mara a ajouté que c’est sur la base de ces éléments qu’il a saisi le Bureau du vérificateur général pour conduire les audits. « Je pense que c’est essentiellement pour convaincre le Fonds sur l’engagement de ces opérations en rapport avec l’éthique que la ministre Bouaré Fily Sissoko est venue vers moi pour que nous engagions le processus de l’audit », a-t-il reconnu. Avant de préciser que les deux marchés n’ont pas fait l’objet de discussion en conseil des ministres.
Pour le cas de l’achat de l’aéronef, il a indiqué que le rapport faisait état de beaucoup d’insuffisances, notamment l’émission du contrat en anglais au lieu du français, les mouvements de fonds non respectueux de finances publiques et le non-respect des règles de passation de marchés.
S’agissant des équipements militaires, l’ex-Chef du gouvernement a révélé que le rapport mentionnait la garantie donnée par l’Etat, ce qui est contraire aux usages. Autre irrégularité évoquée dans le rapport est que sur une même journée, un contrat a été signé par plusieurs intervenants. Sans oublier des mouvements de fonds intervenus sur le compte du bénéficiaire du marché. D’après lui, « le rapport dit que ce qui a été proposé dans le contrat des équipements militaires apparait plus élevé que ce qui avait été proposé par les sous-traitants pour le même type de matériels à un moment du processus. Ce qui laissait penser qu’il y aurait pu avoir de la surfacturation ».
SECRET DEFENSE– Selon le témoin, tant qu’on ne précise pas le contenu de ce qui peut être considéré comme « secret défense et intérêts essentiels de l’Etat », on ouvre la porte aux interprétations. « D’ailleurs, en septembre 2014, nous avons pris un décret pour donner un contenu détaillé au secret défense et aux intérêts essentiels de l’Etat. Cela n’existait pas au moment des faits. Du coup, la porte a été ouverte aux interprétations des uns et des autres », a expliqué Moussa Mara. L’ex-Chef du gouvernement a déclaré n’avoir rien senti chez Mme Bouaré Fily Sissoko comme volonté de cacher quelque chose lorsqu’ils décidaient ensemble de faire l’audit sur les deux marchés.
Il a précisé que l’avion présidentiel a eu un prix d’achat auquel des charges ont été ajoutées notamment, les frais de parking, d’intermédiation, etc. « Le prix d’achat, sur la base des informations qui m’ont été données est 18 milliards FCFA et quelques. Ensuite, il y a des frais qui ont été payés. Et tous ces frais plus le prix d’achat qui a été versé au vendeur font que le coût total est autour de 20 milliards FCFA ou un plus », a détaillé l’ancien Premier ministre. Pour lui, l’aéronef a couté à notre pays entre 20 milliards et 21 milliards FCFA.
D’après Moussa Mara, les deux marchés ont été engagés sous le sceau du secret défense et des intérêts essentiels de l’Etat qui n’était pas suffisamment explicité ou détaillé par un texte. Il a également indiqué que le secret défense est opposable aux membres du gouvernement.
C’est aux environs de 9 heures 37 minutes que le procès a commencé sur la demande de la défense de faire de faire comparaitre l’ancien Premier ministre Oumar Tatam Ly et son ex-ministre délégué chargé du Budget, au moment des faits, Madani Touré.
D’après l’avocat de la défense, le premier a été destinataire initial de la lettre d’intention du contrat d’achat de l’avion présidentiel alors que le second a été associé par ampliation. L’accusée aussi a soutenu que la comparution de ces deux personnalités est cruciale, car elle pourrait même « inverser les responsabilités ».
« Je sortirai frustrée de ce procès si je n’ai pas eu la chance de me confronter à ces deux personnalités », a-t-elle déclaré.
Dans son réquisitoire, le procureur général Kokè Coulibaly a expliqué avoir fait toutes les diligences pour faire comparaitre ces deux personnalités, sans succès. Il a qualifié cette demande de la défense de manœuvre « dilatoire », ajoutant que ces deux personnalités ont été déjà entendues sur le dossier.
Après s’être retirés pour statuer sur la question, les membres de la Cour ont ordonné la poursuite du procès tout en assurant que les dispositions seront prises pour faire comparaitre lesdites personnalités.
BD/MD (AMAP)