La coopération militaire et l’AES : sujets cruciaux au menu

Envoyés spéciaux 

Alassane SOULEYMANE et Oumar DIOP

Moscou, 22 juin (AMAP) Les présidents Goïta et Poutine ont rendez-vous pour l’histoire des relations diplomatiques entre nos deux pays, dans le sillage de la coopération exemplaire tissée entre la République du Mali et la défunte Union des républiques socialistes soviétiques (URSS). Les deux chefs d’Etats, qui se retrouvent dans quelques heures au Kremlin, seront face à face pour la 2e fois, après une première rencontre à Saint-Pétersbourg, en juillet 2023.

Au regard de l’intensité imprimée aux relations diplomatiques, dans un contexte géopolitique mondial tendu, la confiance mutuelle désormais établie offrira une opportunité d’ouvrir des perspectives favorables.

Au niveau ministériel, nos deux chefs de la diplomatie se vouent une estime profonde et professionnelle. La dernière visite officielle du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Abdoulaye Diop, remonte à avril dernier où lui et son homologue russe, Serguei Lavrov, se sont souvenus certainement de la visite de ce dernier au Mali, les 06 et 07 février 2023. Des visites qui ont permis de s’accorder sur les étapes de renforcement du dialogue politique et des relations de coopération multisectorielles.

La visite du très emblématique Lavrov a d’ailleurs balisé la participation du président de la Transition au Sommet Russie-Afrique de Saint-Pétersbourg, en juillet 2023, et qui a abouti à des engagements ambitieux à mettre en œuvre.

En avril dernier, Abdoulaye Diop a salué la coopération maliano-russe qui “se déroule bien sur le terrain”, tout en remerciant Moscou “pour son soutien constant”.

Entre 2022 et ce jour historique du 23 juin 2025, les visites diplomatiques entre la Russie et la Mali se sont multipliées et ont permis de tracer de nouvelles perspectives de coopération.  La participation de la délégation malienne à la 1ère Conférence ministérielle du Forum de Partenariat Russie-Afrique (novembre 2024) a beaucoup œuvré dans ce sens. Plus récemment, la visite d’Alexandre Novak, vice-premier ministre de la Russie en novembre 2024 à Bamako a abouti à d’importants engagements et une volonté commune d’accélérer la mise en œuvre des projets structurants.

La visite officielle du président de la Transition, dont la séquence principale se joue ce lundi au Kremlin, devrait permettre la consolidation du partenariat stratégique Mali-Russie à travers l’organisation de sommets bilatéraux réguliers et la réactivation des mécanismes de consultations diplomatiques, l’opérationnalisation de la commission intergouvernementale sur la coopération commerciale, économique, scientifique et technique entre nos deux pays.

Le séjour du vice-ministre de la Défense de la Fédération de Russie, en mars 2024 à Bamako, a permis de consolider la coopération sécuritaire, notamment en matière de formation militaire, d’équipement et de renseignement. L’entente sincère entre nos deux Etats et la solidité des relations bilatérales fortifient, sans conteste, le soutien réciproque dans les instances internationales.

AU MENU, SECURITE ET AES – En matière de Défense et de Sécurité, la fourniture d’équipements, notamment les vecteurs aériens et la formation du personnel reste la clé de voute de la coopération entre Moscou et Bamako. Ce qui rappelle l’exemplarité des relations bilatérales Mali-URSS entre 1960 et 1990. « Nos militaires coopèrent de manière active avec les militaires du Mali, notamment en les formant ». Ce volet de la coopération est garanti aujourd’hui par un cadre législatif et réglementaire. On rappelle que le Conseil national de Transition (CNT) a approuvé, à l’unanimité, le jeudi 4 juillet 2024, le projet de loi ratifiant l’Accord de coopération militaire et technique entre le Mali et la Fédération de Russie.

Le texte a été validé par le gouvernement en Conseil des ministres en avril 2024. Il vise à intensifier les efforts de lutte contre le terrorisme et à améliorer l’efficacité des Forces armées maliennes (FAMa).

Le texte prévoit l’intervention des instructeurs russes pour former les soldats et les officiers de police. De plus, des équipements militaires seront fournis pour renforcer la capacité de défense du Mali.

Son entrée en vigueur, en janvier dernier, a vite démontré la viabilité de cette forme de coopération, palpable par les populations. Celles-ci assistent, très souvent, à l’arrivée de convois d’équipements militaires acquis auprès du partenaire russe, à l’image de ceux aperçus en janvier et mars derniers et ce début de juin, ainsi qu’à la montée en puissance de nos forces de défense et de sécurité qui engrangent des victoires probantes sur l’ennemi.

Le ministre de la Défense et des anciens Combattants, qui avait défendu le projet de loi, s’est félicité des nombreuses opportunités que cet accord offre au Mali, notamment le transfert de compétences avec l’envoi de stagiaires en Russie pour des études d’ingénieur. Cela, pour ouvrir une véritable ère d’industrialisation du secteur de la Défense et de la Sécurité. « Sous peu, nous allons commencer à produire les munitions ici au Mali et faire l’assemblage de certains véhicules, notamment les blindés », a-t-il expliqué aux membres du CNT.

Au plan institutionnel, la visite du vice-ministre de la Défense de la Fédération de Russie, en mars 2024 à Bamako, a permis de dégager de nouvelles opportunités de coopération, notamment en matière de formation militaire, d’équipement et de renseignement. De même, la prise de fonction de l’Attaché de Défense à l’Ambassade de Russie à Bamako est une avancée importante dans le partenariat militaire.

Au ministère chargé de la Défense, l’on ne tarit pas d’éloges sur l’exemplarité de la coopération militaire et technique avec la Fédération de Russie, à commencer par le ministre Sadio Camara qui confiait aux membres du CNT : « Aujourd’hui, nous sommes fiers de nous-mêmes parce que nous n’avons plus cette pression de nous dire avec qui coopérer ou pas… C’est en toute liberté que nous choisirons nos partenaires en suivant la vision du Chef de l’État sur le respect des trois principes qui guident l’action publique au Mali. »

Cet état d’esprit et la vision qui le nourrit prédominent au sein de la Confédération des Etats du Sahel (AES) présidée par le général d’Armée Assimi Goita, dont la visite officielle fait suite à celle, dans le même pays en mai dernier, du capitaine Ibrahim Traoré, président du Faso, à l’occasion de la commémoration de la journée de la Grande victoire. C’est dire qu’au-delà du bilatéral, le président malien évoquera avec son homologue russe les voies du renforcement de la coopération avec la Confédération AES.

Une réunion quadripartite s’est tenue en avril à Moscou entre la Russie et les trois pays sahéliens au niveau des chefs de la diplomatie. Elle marque une nouvelle étape dans ce rapprochement stratégique entre la Fédération et la Confédération. « Notre volonté commune est de construire un partenariat dynamique et sincère », avait déclaré Abdoulaye Diop.

Le communiqué conjoint publié à l’issue de la rencontre souligne que « dans le domaine de la Sécurité et de la Défense, les parties russe et confédérale ont convenues d’établir un partenariat stratégique pragmatique et solidaire. Elles ont également exprimé leur engagement pour intensifier la lutte contre le terrorisme et l’insécurité sous toutes ses formes dans l’espace AES. Dans cette perspective, la partie russe a réitéré son soutien indéfectible pour l’opérationnalisation de la Force unifiée de la Confédération AES dans sa lutte pour la préservation de l’intégrité territoriale de l’espace confédéral ».

AS/MD (AMAP)