Par Amadou GUÉGUÉRÉ

Bamako, 14 sept (AMAP) Plus de 1.500 cartes grises délivrées sur une prévision d’au moins 15.000, quelque 9.402 personnes ont obtenu leur permis de conduire sur 11.390 candidats présentés. Tel est le bilan de la phase initiale de l’opération spéciale d’immatriculation des motocycles, vélomoteurs et tricycles et de délivrance de permis de conduire.

Lancée le 15 novembre 2021, elle a pris fin le 15 août dernier. L’objectif était de créer des conditions pour que de nombreux usagers puissent se mettre en règle. A l’heure du bilan de cette phase initiale, les attentes ne sont pas comblées. Des voix s’élèvent pour demander une prolongation.

Le directeur national des transports terrestres, maritimes et fluviaux, Mamadou Sow, plaide pour la prolongation jusqu’à la fin de l’année, au regard des difficultés constatées durant ces 9 mois d’activités.

Beaucoup de Maliens se souviennent encore des souffrances endurées, notamment dans la cour de la Direction régionale des transports du District de Bamako, ex-Office national des transports (ONT), qui abritait l’un des trois centres d’examen de l’opération dans la capitale.

Un interlocuteur anonyme, qui a obtenu son permis de conduire, raconte : «J’ai passé plusieurs mois sans obtenir la carte grise. Ils te demandent de déposer une copie de l’acte de dédouanement de l’engin et d’attendre le temps de retrouver l’original dans les archives de la douane ». « J’ai attendu quatre mois sans être appelé. J’ai changé de moto entre-temps. Il y a moins d’un mois, j’ai été voir si les choses avaient évolué mais rien de nouveau», déplore notre interlocuteur.

Il regrette le non-respect par les autorités de la promesse de l’adoption de nouvelles mesures pour éviter les désagréments que causent la recherche des actes de dédouanement originaux.

Si lui, comme de nombreux Maliens, s’est plié en quatre pour les avoir, d’autres ne se sont pas donnés de la peine. Tidiane, la trentenaire, fait partie de ceux-ci. «Faute de moyens», ce résident de Djicoroni-Para ne dispose ni de carte grise, ni de permis de conduire. «J’aimerais vraiment me mettre en règle, mais c’est l’argent qui me manque. Je le ferai si l’opération se prolongeait», dit cet usager qui dit avoir acheté sa première moto, il y a plus de 10 ans.

DIFFICULTÉS – Faman Kéita, un autre motocycliste, explique qu’une urgence survient chaque fois qu’il décide de se mettre en règle. «Ainsi, j’utilise l’argent que j’avais mis de côté pour me procurer ces pièces», confie-t-il, l’air visiblement gêné. Ladji Sanghanta pensait, plutôt, que l’opération concernait uniquement les mototaxis et les tricycles (Katakatani). Cependant, le jeune électricien admet qu’il est bon de se mettre en règle.

Le président du Syndicat national des mototaxis (Synamota) abonde dans le même sens. «Cette immatriculation permet de nous sécuriser aussi bien que nos clients. Elle empêche, également, le vol de motos. La réduction des  coûts des différents documents, a été un soulagement pour nous», commente M. Traoré.

Il déplore la lenteur administrative au niveau des douane et le manque d’information comme difficultés majeures, lors de cette première phase. Selon lui, la douane a, par exemple, des difficultés à délivrer aux motocyclistes le Certificat de mise à la consommation (CMC) exigé pour avoir la carte grise.

« Les activités d’information et de sensibilisation devraient se poursuivre du début jusqu’à la fin de l’opération », souligne le syndicaliste, ajoutant que de nouvelles motos sont mises en circulation tous les jours.

À cet égard, Adama Traoré invite les autorités à proroger l’opération jusqu’à la fin de l’année et retirer le dédouanement de la procédure d’immatriculation. « Car, pense-t-il, il constitue à ce stade le plus grand obstacle à l’accomplissement de l’opération. » En effet, lors de cette première phase, « les engins à deux roues et les tricycles sont immatriculés à 7.500 Fcfa contre 22.750 Fcfa. Et le permis de conduire coûte 5.000 Fcfa contre 15.200 Fcfa », rappelle le directeur national des transports terrestres, maritimes et fluviaux.

« En la matière, l’accès au CMC est un casse-tête pour les motocyclistes », reconnaît Mamadou Sow. Cela au regard, selon lui, de la nature de l’opération. «C’est une opération spéciale caractérisée par la proposition de paiement de frais forfaitaires. Le système douanier a été vraiment ignoré parce qu’il devrait intégrer la somme de 5.000 Fcfa non prévue par les paramètres», argumente Mamadou Sow.

« Durant les neuf mois d’activités, précise-t-il, 22.856 CMC ont été reçus sur la base du tarif plein contre 751 sur la base des 5.000 Fcfa forfaitaire. Au plan régional, la Région de Bougouni a délivré le plus de CMC avec 325 CMC au tarif promotionnel de 5.000 Fcfa, 212 au tarif normal. Elle est suivie, respectivement ,par San (169) et Sikasso (94). »

IMPLICATION FORTE – Quant à la direction régionale des douanes du District de Bamako, « elle n’a traité aucun CMC à 5.000 Fcfa, souligne-M. Sow. Selon lui, l’implication forte et formelle de la Direction générale des douanes est nécessaire pour faire avancer les choses dans le sens souhaité. « Si un propriétaire d’engin dispose de ces documents, on est habilité à lui accorder un numéro d’immatriculation en lui fournissant une carte grise et en apposant une plaque d’immatriculation sur l’engin », soutient le directeur national.

«Nous avons saisi la direction générale des douanes sur instruction de la ministre en charge des Transports pour pouvoir proroger le délai. Avec des changements, nous espérons que les usagers pourront être satisfaits», indique M. Sow. Pour ce faire, un rapport partiel a été envoyé à la hiérarchie, en attendant de finir l’élaboration du rapport final.

M. Sow ajoute : «Nous avons tenu une réunion qui est allée dans le sens de la prolongation de la date de l’opération», assure-t-il. Une réunion de restitution aura lieu dès que le rapport final sera disponible. « Au cours de cette rencontre, explique Mamadou Sow, les participants décideront de proroger ou non l’opération jusqu’au 31 décembre ».

En attendant, ce n’est plus l’affluence des grands jours dans la cour de l’ex-ONT. Les mouvements bruyants des conducteurs de moto venus passer leur examen de conduite a cédé la place à l’ambiance monotone ordinaire du quotidien.

AG/MD (AMAP)