Fête de Tabaski : Le non-stop des tailleurs

Par Alima Nia DOUMBIA

Bamako, 05 juin (AMAP)

En cette veille de fête d’Eid el Kébir, les couturiers n’ont pas de répit. Ils fonctionnent à plein régime pour tenir les délais et satisfaire la clientèle. Mais le challenge est difficile à tenir. Dans les ateliers, le bruit des machines à coudre retentit sans arrêt. C’est une période très intense pour ces ouvriers. À moins d’une semaine de la fête, le rythme de travail augmente. Le promoteur de MK couture, Moussa Koné, témoigne que la majorité des tailleurs travaillent presque 18 à 20 heures par jour. Ce qui entraîne une fatigue extrême, des erreurs de couture et des disputes avec les clients.

MK couture est situé à Sébénicoro, en Commune IV du District de Bamako. Moussa Koné et ses employés travaillent dans une ambiance électrique. Quelques clients sont venus récupérer leurs habits. Celui qui a une expérience de 10 ans dans le métier affirme qu’ils gagnent beaucoup d’argent en cette période. Mais, pas sans peine. Moussa Koné souligne qu’ils dorment à peine, mangent à la hâte, parfois même sur la machine. Ce maitre tailleur  précise qu’il rejette les clients des dernières minutes, en tout cas tous ceux qui le sollicitent à moins d’un mois de la fête.

Face à la forte demande, certains tailleurs recrutent des apprentis ou des aides temporaires. Le promoteur de MK couture regrette que la plupart de ceux-ci ne sont pas bien formés. «Ce qui peut nuire à la qualité des finitions». Il lui arrive de reprendre deux fois une même tenue cousue par un apprenti. L’ouvrier est préoccupé par le fait que des clients demandent à coudre des modèles sophistiqués vus en ligne, sans tenir compte de leur complexité, notamment ceux des stars. Selon lui, ils devraient comprendre que la période n’est pas appropriée pour la confection de ce genre de tenue. Par contre, notre interlocuteur estime que l’accès à l’électricité s’est nettement amélioré cette année.

À LA DERNIÈRE MINUTE– Lamine Diouf est âgé d’une cinquantaine d’années. Ce tailleur de teint noir, cumule une vingtaine d’années d’expériences dans son métier. Depuis son atelier sis au quartier du fleuve, il affirme avoir reçu beaucoup de clients cette année encore. Le quinquagénaire dénonce l’attitude de nombreux clients consistant à venir en masse à la dernière minute.

Le couturier précise que les demandes des clients portent sur des boubous brodés, des bazins riches, des modèles sénégalais ou encore des coupes modernes inspirées des stars. Lamine Diouf déplore que certains clients oublient que les tailleurs ne sont pas des magiciens. «Ils viennent seulement à quelques jours de la fête tout en espérant un travail soigné», regrette-t-il. Pour lui, les préoccupations des tailleurs sont liées au retard de paiement des frais de couture, le coût élevé des tissus et l’impatience de la clientèle. Malgré toutes ces contraintes, il affirme que beaucoup de tailleurs restent passionnés par leur métier. Poursuivant que leur travail est stressant. Mais, se réjouit-il, le sourire des clients lorsqu’ils essaient leur tenue constitue une belle récompense morale.

L’atelier de Aïssatou Ba se trouve à Djicoroni Para, en Commune IV du District de Bamako. Des couturiers et couturières sont concentrés sur leur travail afin de finir les habits des clients à temps. Couturière depuis sept ans, la promotrice affirme qu’il y a moins de clients cette année. Elle justifie cela par la concurrence déloyale de nombreux ateliers de proximité. L’entrepreneure précise que les clients recherchent des tenues originales souvent confectionnées avec des tissus wax ou des broderies modernes. Parmi les difficultés rencontrées, elle mentionne la gestion des attentes des clients qui souhaitent obtenir leurs tenues en deux trois jours, ainsi que les coupures d’électricité. Toutefois, elle a souligné qu’elle parvient à surmonter ces obstacles.

La commerçante Fatoumata Diarra est mère de 4 enfants. Elle apprécie la qualité du travail réalisé par son tailleur ainsi que l’attention qu’il porte aux clients. Selon elle, son atelier propose une belle sélection de modèles d’habit sans oublier la  livraison des tenues à temps. C’est pourquoi, elle continue de maintenir les liens avec son tailleur. Awa Koné, une mère de 3 enfants, est venue s’enquérir de l’état d’avancement de ses habits. Elle dit avoir changé de couturier cette année parce que l’année dernière, sa tenue n’a pas été pas prête pour la fête. «Cette fois, j’ai choisi un atelier plus sérieux et plus fiable », avoue-t-elle. Et de relever que la fête de Tabaski est importante pour les femmes et les enfants. « On veut être élégant ce jour-là», sourit-elle.

Dans un atelier, nous rencontrons Fatoumata Diallo, étudiante en droit, en pleine discussion avec son tailleur. Ce dernier lui a été recommandé par une amie.  L’étudiante aime les tissus à la mode. Elle indique avoir déposé sa tenue il y a un mois pour avoir une coupe de qualité à temps. «J’ai été déçue une fois, car ma robe avait été trop serrée. J’ai dû aller chez un autre tailleur pour la retoucher la veille de la fête ce qui n’était pas facile», se rappelle-t-elle, avant d’ajouter qu’elle ne souhaite plus revivre cette expérience.

AD/MD (AMAP)