Par Ouka BA
Diéma, 5 mai (2025) À Diéma, le néguété bougouté, ces arachides grillées avec leur coque, reste un symbole de la culture soninké et un aliment incontournable. Croquant sous la dent des travailleurs des champs comme des écoliers, il rythme les pauses et les veillées. Malgré les influences culinaires modernes, cet amuse-gueule traditionnel conserve une place de choix dans le quotidien des habitants. Rencontre avec ceux qui font vivre cette tradition.
Ici, le néguété bougouté, c’est bien plus qu’une simple arachide grillée. Selon une légende locale, son nom est né d’une mésaventure. « Une femme apportant le repas aux travailleurs des champs a renversé la nourriture en croyant voir une hyène. Elle leur a, alors, offert des arachides grillées. En les croquant, son beau-fils a nommé cet aliment ‘néguété bougouté’ à cause du bruit des dents », », raconte Madou Diarra, producteur agricole. Depuis, ce terme résonne dans tout le milieu soninké pour désigner ces arachides fraîches, légèrement grillées sous la braise et le sable, prêtes à calmer la faim.
LEGENDE – Dans les champs, le néguété bougouté est un compagnon fidèle. Les femmes l’apportent aux cultivateurs qui, sous l’ombre des arbres, le croquent pour tromper la faim en attendant le couscous à la sauce d’arachide. « Si j’ai du néguété bougouté dans ma poche, je peux désherber mon champ sans souffrir de la faim », confie Madou Diarra.
Mais cet amuse-gueule dépasse les champs. Les jeunes l’apprécient lors des veillées nocturnes, autour d’un thé. À midi, l’écolier Abdoulaye puise dans la réserve de sa grand-mère si le repas tarde. « C’est pratique et délicieux », dit-il avec un sourire. Même les voyageurs, comme Fousseny Kanté, forain, y trouvent leur compte : « Quand j’arrive tard et que les restaurants sont fermés, le néguété bougouté me sauve ! »
TRADITION CULINAIRE MENACEE – Malgré sa popularité, le néguété bougouté fait face aux changements des habitudes alimentaires, influencées par des modèles occidentaux. Salif Doumbia, animateur d’une ONG, s’inquiète : « Nos traditions culinaires s’effritent. Si nous ne sensibilisons pas les populations, les générations futures perdront leurs repères. » Allumant une cigarette, il insiste : « Le néguété bougouté, c’est notre identité. Il faut le préserver à tout prix. » Pour Bourama Traoré, bourrelier, cet aliment reste une solution économique. « Quand j’en mange assez, je n’ai besoin que d’eau », explique-t-il, vantant sa capacité à rassasier.
À Diéma, le processus de préparation – griller les arachides fraîches, les enfouir dans le sable chaud, puis les conserver jusqu’à l’hivernage – est un rituel qui unit les générations.
Un croustillant indémodable
Le néguété bougouté n’est pas près de disparaître. « C’est un croustillant ancré dans nos habitudes », affirme Madou Diarra. Que ce soit dans les champs, à l’école ou lors des veillées, il reste un symbole de convivialité et de résilience.
À Diéma, cet aliment simple mais savoureux continue de rassembler, rappelant que les traditions soninké ont encore de beaux jours devant elles.
OB/MD (AMAP)


