
Les détritus tirés des voies de canalisation ne sont pas évacués à temps. Et, dans la plupart des cas, ils finissent là où ils étaient.
Par Souleymane SIDIBE
Bamako, 04 août (AMAP) Depuis quelques temps, le curage des caniveaux, considéré comme le meilleur moyen d’empêcher la stagnation des eaux de pluie pendant l’hivernage, est en cours dans les communes et quartiers du District de Bamako, la capitale malienne. Mais le problème est qu’après le nettoyage, les détritus trainent longtemps aux abords des caniveaux avant d’être évacués.
A Hamdallaye ACI 2000, Mohamed Dicko gère une boutique d’articles divers. Devant son commerce, des déchets, mottes de boue, bouteilles, sachets et autres détritus agressent le regard. «Cela fait cinq jours que le curage des caniveaux est en cours. Après avoir curé, ils ont laissé derrière eux un tas d’ordures devant ma boutique. Cela joue beaucoup sur ma clientèle. Tant que ces déchets sont là, certains clients ne pourront jamais accéder à mon magasin», se plaint le commerçant.
«Ces détritus posent des problèmes comme les moustiques, les mouches et peuvent aussi provoquer d’autres maladies, sans oublier les odeurs nauséabondes qu’ils dégagent», ajoute M. Dicko.
Le commerçant d’origine mauritanienne n’est pas le seul à se plaindre de la situation. Presque tous ses voisins sont touchés par le problème. «Quand ils ont enlevé les dalles pour nettoyer les caniveaux, la plupart des déchets y sont retournés, faute d’avoir été évacués», ont affirmé plusieurs habitants du quartier.
Le curage des caniveaux se fait aussi par les volontaires. Le week-end dernier à Lafiabougou en Commune IV, des jeunes se sont mobilisés pour assainir leur quartier. «C’est une action que nous menons chaque année pour la santé de tout le monde. Nous voulons que les autres prennent l’exemple sur nous», a dit le coordinateur du groupe de jeunes que nous avons rencontré au niveau du «frou-frou carré».
Le geste est noble sauf qu’après, le curage des caniveaux, les déchets ne sont pas enlevés et on se retrouve avec des tas d’ordures le long des voies. Les riverains sont ainsi envahis par les odeurs et l’état de certaines rues laisse à désirer.
La gestion des ordures a toujours été au centre des débats, surtout pendant l’hivernage. Et l’un des reproches faits par les populations est le retard dans le ramassage des ordures après le curage des caniveaux. Après Hamdalaye ACI, notre équipe de reportage a mis le cap sur Kalabancoura ACI où se déroulait une opération de curage des caniveaux. Ici, ce n’était pas un groupe, mais deux personnes qui travaillaient dans une grande rue. L’un creusait à l’aide d’une pioche alors que l’autre, muni de pelle, ramassait les ordures. Les deux hommes étaient chaussés de bottes et portaient, chacun des gants. «Notre travail consiste à enlever les déchets, mais le ramassage ne fait pas partie de notre contrat», précise l’un d’eux qui était torse nu.
Sur le long de la voie, on pouvait voir de nombreux monticules d’ordures. Chez les habitants du quartier, comme chez les usagers de la route c’est le ras-le-bol. «Chaque année, c’est le même spectacle. Les caniveaux sont curés mais les déchets ne sont pas ramassés», s’offusque un passant.
DEBLAIS NON ENLEVES – Après les fortes pluies du mercredi 22 juin, les abords des caniveaux de Lafiabougou ressemblaient à un dépôt de transit. Les eaux usées ne coulaient plus. Pour le chef du service de l’Assainissement et du contrôle des pollutions et des nuisances de la Mairie de la Commune IV, le curage est de qualité mais le problème est que les déchets ne sont pas évacués à temps. «On est en période d’hivernage. Après les pluies, les déblais enlevés retournent dans les caniveaux. C’est ce phénomène qu’on est en train de vivre», lâche Oumar N’Faly Camara, avant d’inviter les entreprises chargées des déchets de revoir leur copie.
«La Mairie n’a qu’un camion benne de 7m3 qui n’est pas souvent en bon état. Ce seul engin ne peut pas couvrir les efforts de curage des huit quartiers de la Commune IV. Il faut qu’il y ait un engagement politique au niveau national. La part de l’assainissement dans le budget national n’a pas encore atteint 1%, donc il faut plus d’efforts», a expliqué Oumar N’Faly Camara. Le rôle de la mairie est de contrôler la conformité.
«Nous menons des missions de contrôle dans tous les quartiers. Chaque jour, nous enregistrons des plaintes par rapport aux rejets des eaux usées dans la rue, des caniveaux et des parcelles. Entre voisins aujourd’hui, c’est un casse-tête. L’une de nos missions, c’est l’intermédiation. Nous intervenons pour faire appliquer la loi et sensibiliser les contrevenants», a expliqué le responsable municipal.
Oumar N’Faly Camara a aussi évoqué l’insuffisance des ouvrages et la mauvaise conception ainsi que le mauvais comportement de certaines personnes. « Le réseau de drainage des eaux pluviales de la Commune IV est insuffisant et mal conçu. Cela ne permet pas de drainer toutes les eaux. Ainsi, quand il pleut, on constate des stagnations importantes en plusieurs certains endroits », signale le chef du service de l’Assainissement et du contrôle des pollutions et des nuisances de la mairie de la Commune IV.
Malheureusement cette situation est presque identique à l’échelle de la capitale, où on trouve des caniveaux sous-dimensionnés et très mal conçus pour recueillir et drainer les eaux pluviales. La population et les usagers en payent le prix en termes de pollutions et d’insalubrité.
SS/MD (AMAP)