Batasso, près de Bafoulabé :  L’école sous la paillotte

Par Boubacar MACALOU

Bafoulabé, 06 dec (AMAP) N’allez pas parler aux populations du village de Karamokobougou et celles de leur hameau de culture, Batasso, du concept : « Un Village, Une Ecole », lancé au début de la dernière décennie par l’ancien président malien, Alpha Oumar Konaré. Pourquoi ?

L’application de cette formule soulève, ici, des problèmes épineux qui compromettent l’éducation des enfants. Comme c’est malheureusement et généralement le cas à Bafoulabé, dans la Région de Kayes, dans l’Ouest du Mali.  Les populations ne cessent de faire le plaidoyer pour la construction d’une école moderne.

A Batasso, situé à 1km de Bafouabé, les élèves étudient sous des paillottes faites de tiges de céréales. Cette école qui appartient au village de Karamokobougou, a été construite en 2001 pour promouvoir l’éducation dans les campagnes. Elle compte un effectif de 79 élèves aujourd’hui. D’après l’administration scolaire, le mode de recrutement est biennal.

A défaut d’avoir de bons locaux répondant aux normes admises, les mouflets se contentent de de bivouac. Qui les expose au soleil. Or, le reflet des rayons solaires sur le cahier affecte beaucoup la vision des écoliers. Outre ces problèmes, le maître est souvent obligé d’interrompre pour chasser les serpents de la salle de classe.

Le hic, c’est que les villageois sont contraints de refaire ces paillotes, à chaque rentrée scolaire et après les récoltes. D’où le retard dans le démarrage des cours dans cette localité de la 1ère région administrative du Mali.

En effet, l’entretien de l’établissement scolaire de fortune est un problème crucial dans la commune de Bafoulabé qui englobe ces deux localités. L’unique école de Karamokobougou qui a été construite sur le site de Batasso risque de disparaître si la mairie et les populations ne prennent pas des dispositions pour construire une nouvelle école en dur. De sa création en 2001 à nos jours, la rentrée scolaire n’a jamais été effective dans cette localité du cercle de Bafoulabé.

« Ici, les populations attendent la récolte du mil afin d’avoir des tiges pour la confection de nouveaux hangars afin que l’école rouvre ses portes pour la nouvelle année scolaire. Une situation qui pénalise les apprenants et place l’administration scolaire dans l’angoisse car dans ces conditions, il sera très difficile pour les maîtres d’épuiser leur programme, après deux à trois mois de retard », affirme Makan Coulibaly, directeur de cette école.

Bakary Sacko, élève en 6ème Année, déplore le fait que le Comité de gestion scolaire (CGS) soit obligé de confectionner, chaque année, des hangars afin que les élèves puissent étudier. Il se plaint de l’état des classes « pas rassurant » puisque celles-ci n’offrent aucune commodité à ses occupants qui se contentent des rayons du soleil comme source d’éclairage.

« Je ne peux même pas bien voir les écritures au tableau quand le soleil apparait. Les rayons entrent à travers le toit. Leur reflet sur les cahiers affecte nos yeux. En classe, on ne fait pas une semaine sans chasser un serpent. Après les récoltes, les animaux domestiques sont laissés à eux- mêmes. Ils viennent brouter les herbes ou les pailles servant d’enclos pour nos classes », se lamente l’écolier.

En effet, l’école de Karamokobougou, à Batasso, constitue un abris pour les animaux en divagation. Des bêtes qui n’épargnent rien sur leur passage : elles détruisent par endroit les salles de classe de fortune. Ces classes servent aussi de cache pour les serpents.

Face à cette situation alarmante et inquiétante, les enfants, tout comme leurs parents et proches, ne peuvent que lancer des cris du coeur, en vue d’inciter les autorités locales à agir pour le bien-être des enfants qui sont les futurs cadres de demain.

Ce hameau est habité par des gens venus de Karamokobougou, dont les fondateurs viennent du Wassoulou. A Batasso, les gens s’adonnent principalement à l’agriculture. Au fil du temps, le hameau est devenu prospère, ravissant du coup la vedette à son village affilié, Karamokobougou, qu’il a tendance à l’absorber. De nos jours, on a l’impression que ces deux localités forment un même village. Surtout que Batasso compte 399 habitants.

Karamokobougou, petite localité Ouassoulounké, est peuplé de 100 habitants essentiellement composés de Malinkés et de Khassonkés, d’après le Récencement général de la population et de l’habitat (RGPH) de 2009. Un nombre jugé insuffisant pour la construction d’une école dans le village dont les enfants parcourent 1 km tous les jours pour se rendre à l’école située au hameau (Batasso).

« Pour construire 3 salles de classes et une direction, il faut réunir beaucoup de millions. Ce qui n’est pas à notre portée », confie Hawa Damba, présidente du CGS. « Pour le moment, les démarches auprès des fils du village et de la mairie restent vaines », regrette Djibril Touré, conseiller villageois.

« Depuis 22 ans, jour pour jour, nous nous couchons et réveillons avec le souci d’acquérir de nouvelles salles de classe. Nous cherchons des bonnes volontés pour nous soulager», confie la présidente du C.G.S.

A la demande du maire, Kandé Doucouré, la population a déposé une demande pour la construction de 3 salles de classes en 2015. Cette demande a été actualisée en 2019. Sans succès ! Au même moment, une demande similaire a été adressée aux ressortissants du village. La réponse a toujours été : « Nous vous chercherons des bonnes volontés ».

BM/MD (AMAP)