Par Mohamed DIAWARA
Bamako, 05 juin (AMAP) Les Ségoviens se sont bâtis une réputation dans ce domaine au point d’être pris en exemple par les ressortissants d’autres localités. La fête, c’est chez soi, à la « maison », que ça passe. Finalement, l’habitude s’est bien ancrée chez les régionaux (on dira provinciaux, ailleurs) et autres villageois : il retourner célébrer auprès des leurs la fête des moutons
La formule revient incessamment à l’approche de chaque fête de Tabaski : «segu ka tè feti ke Bamako», prosaïquement le Ségovien ne fête jamais à Bamako. Les ressortissants de la cité des Balanzans, située à un peu plus de 235 km de la capitale, ont établi une règle non écrite, celle de ne jamais fêter à Bamako tant qu’ils le peuvent. Ousseyni Sylla, ressortissant de Ségou retourne au bercail pour célébrer l’Aid el-kébir avec la famille. Même à 78 ans, il continue à perpétuer cette habitude. « À l’époque, on empruntait un type de taxi au niveau de la Grande mosquée de Bamako », se souvient le septuagénaire. Il invite les transporteurs à mieux organiser le départ des voyageurs à l’occasion de la fête.
Selon lui, Ségou enregistre un grand nombre de voyageurs parce que, la région est proche de Bamako. Certains font même le trajet à moto. Mamadou Tangara, gérant de la compagnie de transport Air Niono, partage cet avis. Lui aussi pense que la proximité de la région avec Bamako y est pour quelque chose. Mais en plus il y a, selon lui, l’attachement indicible des Ségoviens à leur contrée.
Fatoumata Coulibaly part fêter à Ségou depuis 2003. C’est une occasion de rendre visite aux parents et de profiter de la compagnie familiale. Elle affirme être contrainte de rentrer à la maison faute de billet. Elle pointe du doigt la compagnie d’être responsable de cette situation pour le bazar.
Beaucoup de ressortissants des régions et des villages qui ont aujourd’hui trouvé gîte et couvert dans la capitale font le voyage dans le sens inverse pour pouvoir célébrer chez eux la fête des moutons. Il suffit pour s’en convaincre de faire le tour des gares routières pour se rendre compte de la forte sollicitation des compagnies de transport par ces voyageurs.
Hier, mercredi, à la gare de Sogoniko, la place de la compagnie de transport Air Niono, grouillait de monde. Les voyageurs et accompagnants se marchaient sur les pieds pour se frayer un passage. Un jeune homme, coiffé d’un bonnet, s’exclame. Au même moment, des voyageurs, billets en main, patientent avec leurs bagages. En face d’un bus positionné pour le départ, une voix masculine sonne comme un soulagement pour les voyageurs en destination de Diabali et Niono.
Tata Diarra, revenue d’Abidjan pour regagner Chouala Coura ou KO3 dans la Commune rurale de Dogofry s’impatiente en compagnie de trois garçons, dont des jumeaux de moins de trois ans. L’un d’entre eux joue avec une bouteille vide. Tata et les siens sont revenus d’Abidjan la vieille aux environs de 21 heures. Elle se plaint du soleil brûlant. « Mes enfants ont la diarrhée et la fièvre », se lamente-t-elle, avant d’ajouter qu’elle ignore quand est-ce qu’ils embarqueront pour le départ. D’autres voyageurs pour la même destination attendent aussi. Une autre file se forme avec d’autres ressortissants des deux localités pour acquérir le ticket de transport.
Diah Coulibaly rejoint la file et n’entend pas rentrer sans obtenir un billet pour Markala. L’étudiant en médecine déplore que de nombreux voyageurs attendent les deux derniers jours pour voyager. Lui serait déjà parti sans les contraintes scolaires. Sur ces entrefaites, un autre voyageur arrive. Il dit être prêt à rester de 9 à 19 heures s’il le faut pour avoir son ticket de transport.
Mamadou Tangara a les yeux rivés sur un dispositif avec une caméra de surveillance. Il assure que sa compagnie fait tout pour répondre à la demande. « Hier, nous avons effectué 50 départs de 2 heures à 22 heures. Ce ne sont pas les moyens qui manquen t», explique-t-il, avant de préciser que le parc auto de sa compagnie a été renforcé avec l’arrivée de nouveaux bus.
Par jour, Air Niono effectue 30 départs destinés à Niono, 15 à Ségou et 3 à destination de Diabali Dogofry. Mamadou Tangara affirme que les tarifs de 6 000 Fcfa pour la ville de Niono, 5 000 pour Markala et 4 000 pour Ségou restent inchangés même en cette période.
À la gare routière de Sogoniko, un transporteur surnommé Ivo, portant une serviette sur l’épaule gauche, apostrophe les clients. Il justifie la faible affluence par le fait que la plupart des partants sont déjà arrivés à destination. Selon lui, la gare sera plus calme demain. Ivo reconnaît que les tarifs des billets ont augmenté chez certains transporteurs. Il témoigne avoir vu des voyageurs aller à Ségou à 7 000 au lieu de 3 000 en temps normal. Au niveau de la place de Banimonotié transport, le 6è car de la journée du mercredi vrombit pendant que des voyageurs entrent. Certains voyageurs achètent de petits cadeaux pour leurs enfants. Une dame voilée essaie de faire taire son garçon de trois ans en lui proposant le téléphone. L’astuce ne porte pas fruit face à un môme récalcitrant. Ramata Doumbia, la tante du garçon, explique qu’ils patientent depuis 7 heures. La ressortissante de Bougouni fustige l’augmentation du prix du billet pour sa ville natale de 2 000 à 3 000 Fcfa.
Au niveau de la compagnie Somatra, la cour est bondée de visiteurs. Tous les espaces ombragés du site sont occupés. Mais de nombreux voyageurs restent aussi sous le soleil. Certains commencent à revendiquer le respect des horaires de voyages fixés par la compagnie. Un jeune homme, ressortissant de Mopti, sous anonymat, dit qu’il est sur place depuis 5 heures. Mais, il explique qu’on donne la priorité aux voyageurs de Ségou.
Alpha Oumar Diakité, chargé d’organiser les départ des voyageurs à Somatra, indique que l’opération se passe bien. Il précise que sa compagnie a acheté des bus VIP pour le confort des clients. Il affirme que le tarif pour Ségou a baissé de 4 000 à 3 000 Fcfa. En cette période, la Somatra enregistre 20 départs par jour vers Ségou contre un respectivement pour les Régions de Mopti (Centre) et Sikasso (Sud).
MD/MD (AMAP)


