Par Babba B. COULIBALY

Le monde rural réclame des équipements modernes et une loi de programmation et d’investissement du secteur agricole à l’image de la loi de programmation militaire. L’état est en train d’œuvrer dans ce sens, convaincu que ces conditions sont nécessaires au développement de la production et de la productivité agricole

Adoptée en 2017, la Loi d’orientation agricole est un instrument juridique qui fixe les orientations de la politique de développement agricole de notre pays. à travers cette loi, les pouvoirs publics veulent donner à l’agriculture une dimension très solide permettant de produire plus et d’exporter. De l’avis des acteurs du secteur, cette loi enregistre des acquis notables et les perspectives sont bonnes. 

Dr Daouda Diarra, chargé de mission au ministère du Développement rural

Chargé de mission au ministère du Développement rural, Dr Daouda Diarra estime que la loi d’Orientation agricole offre au secteur agricole des outils structurants qui permettent d’apporter le changement nécessaire. De l’analyse de cet expert, l’application d’une loi est une demande structurante. Pour lui, un des enjeux majeurs aujourd’hui, c’est comment sécuriser les terres agricoles ? Sans la terre il n’y a pas d’agriculture. Aujourd’hui le Mali dispose d’une loi sur le foncier agricole, une politique foncière agricole. À partir de cet instant, tout ce que nous faisons, repose sur une dynamique qui donne des moyens permettant aux exploitants de se sécuriser, fait savoir Dr Diarra. Il ajoute que les terres agricoles aux alentours des grandes agglomérations transformées en construction, sont protégées par cette loi. Toute chose qui permet aux exploitants de ne plus être victime de certains abus. 

Outre la mise en place et le fonctionnement du Conseil supérieur de l’agriculture, présidé par le chef de l’État, la mise en place du Fonds national d’appui à l’agriculture figure parmi les acquis de la loi d’orientation agricole. L’objectif recherché est de doter le secteur agricole des moyens financiers conséquents pour pouvoir faire face à des besoins cruciaux. S’y s’ajoute la mise en place des  inter-professions du secteur. S’agissant des perspectives, le spécialiste nous confie qu’il est nécessaire d’offrir des outils structurants. Notamment, l’organisation du monde rural, la protection sociale agricole, appelée instrument assuranciel. Un vaste chantier permettra, selon lui, de donner les moyens aux exploitants agricoles à l’image de l’Assurance maladie obligatoire (AMO). 

UNE LOI AVANT-GARDISTE – Il ressort des explications de cet expert, que la loi d’orientation agricole, prévoit en son article 195 un chapitre de programmation et d’investissement du secteur agricole à l’image de l’armée. Les perspectives se déroulent autour d’un mécanisme de protection de revenus agricoles. Sans revenu, il n’y a pas d’agriculteurs. Le revenu agricole doit être renforcé par la contractualisation en agriculture. Ce sont des contrats juridiquement solides, établis entre l’exploitant et le transformateur ou le transporteur. Ces contrats s’étaleront sur 5 à 6 ans, sur des moyens solides qui permettront de travailler dans le sens de l’investissement à court et moyen termes, précise notre interlocuteur. 

Le président de Assemblée permanente des chambres d’agriculture du Mali (APCAM), Sanoussi Bouya Sylla

Abondant dans le même sens, le président de Assemblée permanente des chambres d’agriculture du Mali (APCAM), Sanoussi Bouya Sylla, estime que s’il y’a une loi qui a été véritablement débattue par toutes les couches sociales du pays, c’est bien la loi d’orientation agricole. Cependant, il reconnaît que certains décrets d’application tardent à venir. Par exemple, il est prévu une loi de programmation et d’investissement du secteur agricole. à cet effet, le président de la Transition, le colonel Assimi Goïta a donné des instructions pour l’application effective de cette loi. 

Le patron de l’APCAM estime que si ce document est élaboré conformément à la vision des producteurs agricoles, c’est-à-dire, 75% d’investissement et 25% de frais de fonctionnement, ce sera le début de la relance de l’agriculture de notre pays. « Nous devons refonder l’agriculture et faire un plan maréchal agricole en profondeur avec l’avis des producteurs agricoles », suggère le président de l’APCAM qui plaide pour la loi de programmation et d’investissement du secteur agricole à l’image de la loi de programmation militaire. 

En termes de perspectives, il estime que l’agriculture doit être repensée à travers un débat franc entre la profession agricole et l’encadrement. « à ce jour, malgré l’impulsion du chef de l’état et les directives données au Conseil supérieur de l’agriculture, la profession l’agricole a des difficultés à faire entendre sa voix », déplore le président de l’APCAM.

MÉCANISATION – Notre agriculture est à 90% basée encore sur la traction animale et la daba, selon des experts en la matière. Et avec l’exode rural, trouver la main d’œuvre champêtre relève du parcours du combattant. Face cette situation, la mécanisation de l’agriculture s’impose. Selon Sanoussi Bouya Sylla, pour atteindre notre souveraineté alimentaire et exporter, ce qui est la vocation du Mali, il faut forcément mécaniser l’agriculture. à cet égard, il a félicité le chef de l’Etat pour les 225 tracteurs remis récemment aux producteurs agricoles. Pour le développement de la mécanisation agricole, notre interlocuteur préconise la création des coopératives d’utilisations des machines agricoles. De son point de vue, l’agriculture doit devenir quelque chose qui se pratique 12 mois dans l’année. 

Aghatam Ag Alhassane, directeur national du Génie rural

Pour Aghatam Ag Alhassane, directeur national du Génie rural, la mécanisation devient indispensable pour le pays dans la mesure où la main d’œuvre n’existe plus. Pour ce faire, la population agricole a besoin d’être équipée pour diminuer la pénibilité du travail et permettre d’emblaver beaucoup plus de superficie, poursuit-il. Grace à la mécanisation de l’agriculture, beaucoup de paysans se sont dotés en équipement agricole. La loi d’orientation agricole a été une révolution pour le secteur agricole du pays, qui s’est doté d’une unité d’assemblage des tracteurs (Mali tracteur sa) à Samanko, se réjouit le ministre du Développement rural Modibo Keïta. Pour une plus grande mécanisation de notre agriculture, outre la subvention des équipements agricoles, l’état a ouvert la voie aux investisseurs dans le domaine des équipements agricoles. 

BBC (AMAP)